Marat Safin

LE FIGARO. - Il ne vous reste que quelques mois sur le circuit, y a-t-il quelque chose que vous ayez envie d'accomplir ?
Marat SAFIN. - Prendre du plaisir, maintenant qu'il n'y a plus de pression. Le tennis est un sport difficile, qui implique beaucoup de sacrifices. On est seul.

À 20 ans, vous avez remporté l'US Open et atteint la première place mondiale quelques semaines plus tard, quel regard portez-vous sur cette époque ?
Je n'avais aucune peur. Personne n'attendait rien de moi. Mais c'était bizarre. Tout d'un coup, j'ai remporté un Grand Chelem, je suis devenu numéro un. Je me suis dit, et maintenant ? J'ai eu l'impression de me heurter à un mur. Ensuite, il fallait gagner un deuxième Grand Chelem. Lorsque je l'ai fait à Melbourne en 2005, je n'ai jamais ressenti de pire souffrance sur le court que durant la finale. Si j'avais perdu, la déception aurait été énorme.

Si vous pouviez revenir en arrière, changeriez-vous quelque chose dans votre carrière ?
Quand on est jeune, on ne prend pas toujours les décisions qu'il faut. On a tendance à regarder devant soi et à foncer direct, plutôt que de considérer tous les aspects d'un problème et de penser au long terme. J'aurais peut-être pu réussir mieux, mais je suis heureux de ce que j'ai accompli. Je n'avais jamais imaginé devenir numéro un.

Vous aviez peut-être sous-estimé votre potentiel…
Quand j'avais 17 ans, mon sponsor m'a lâché et je me suis retrouvé du jour au lendemain sans argent. Je suis rentré chez moi, je ne me suis pas entraîné pendant deux mois. Et puis, IMG m'a contacté. Mais aujourd'hui, je pourrais être ailleurs.

Le jour où vous l'avez écrasé en finale de l'US Open, en 2000, Pete Sampras a dit que vous deviendriez aussi fort que vous le décideriez…
C'est la meilleure phrase que quelqu'un ait jamais prononcée sur moi. Il n'a pas spéculé sur mon avenir.La nouvelle règle de localisation pour le programme antidopage provoque quelques protestations parmi les joueurs,qu'en pensez-vous ? Chacun devrait pouvoir préserver sa vie privée. Il y a eu des problèmes en athlétisme, mais chaque discipline est différente. Nous devrions pouvoir décider ce qui est bon pour nous. Il y a des jours où je voudrais pouvoir décider de ne voir personne.Mais comment les contrôles inopinés seraient-ils possibles dans ces conditions ? Pas de contrôles inopinés, alors. Il n'y a pas eu tant de contrôles positifs que cela sur le circuit ATP. On n'a pas besoin de tous ces produits pour réussir en tennis. Je ne pense pas qu'il y ait de dopage sur le circuit. Mais ce n'est que mon opinion.

En 2002 à Melbourne, vous avez publiquement tenu des propos très durs sur la façon dont votre sœur Dinara gérait sa carrière, le regrettez-vous ?
Je veux ce qui est le mieux pour ma sœur. J'ai dit qu'il était tant pour elle de procéder à des changements, de prendre un entraîneur. L'affirmer publiquement était la seule façon qu'elle m'écoute. Elle a pris les décisions que je suggérais et regardez où elle est maintenant.

Que pensez-vous de Nadal, Federer, Murray ?
Ils sont incroyables. La couverture de terrain de Nadal et ses capacités physiques sont exceptionnelles. Je pourrais regarder Federer jouer toute la journée, tellement ce qu'il fait est beau. Quant à Murray, il étudie l'adversaire depuis le premier point. Quand on arrive au quatrième jeu, il sait exactement quels coups vous possédez et à quel moment vous les sortez. Comme dans une partie de poker, où vous avez déjà abattu vos cartes.

Où serez-vous dans un an ?
Cela dépendra des opportunités qui se présenteront.

Serez-vous impliqué dans le tennis ?
Pas en tant qu'entraîneur

Directeur de tournoi, capitaine de Coupe Davis ?
Je veux m'offrir la possibilité de tenter autre chose. Pas dans le tennis, mais dans le sport, en Russie et de façon globale. Je ne veux pas en parler maintenant, parce que si ça ne marche pas, je passerais pour un idiot. Vous en saurez plus à l'automne.

Qu'est-ce qui vous manquera de la vie de joueur ?
Pas grand-chose, je pense. On verra.

En dehors du tennis, quel est votre plus grand talent ?
Je ne l'ai pas encore découvert. J'adorerais peindre, par exemple, mais je ne sais pas ce dont je suis capable.